Le Panafricanisme : “Entre Idéal d'Unité et Réalités Conflictuelles”

Avant toute chose, il s’avère vital de commencer par définir le concept de panafricanisme. Ce terme, pour certains, a été employé pour la toute première fois par Sylvester Williams, pour d’autres par Marcus Garvey, surnommé le Moïse noir pour avoir construit un bateau afin de rapatrier les Africains d’Amérique vers l’Afrique.

Le panafricanisme peut également s’écrire Pan-Africanisme afin de désigner les territoires africains qui doivent être regroupés pour former un tout. Pour la toute première fois, Kwame Nkrumah a évoqué ce concept comme l’expression des aspirations des Noirs d’Afrique. Ce concept, faisant partie du fondement idéologique du Droit communautaire africain, a également été défini par Abdoulaye Wade comme l’expression des aspirations des Noirs d’Afrique et de ceux de la diaspora qui s’identifient culturellement comme appartenant aux Noirs de l’Afrique et de la civilisation négro-africaine, laquelle est née de la force et qui décide de vivre sous forme d’unité comme les États-Unis d’Amérique.

Dans le cadre du panafricanisme, les Africains cherchaient et cherchent encore à créer l’unité entre eux, l’accession à la souveraineté, tant nationale qu’internationale. Pour la matérialisation du panafricanisme, les leaders africains avaient décidé de s’unir pour créer une organisation politique appelée l’OUA, le 25/05/1963. Cependant, avant la mise en place de cette organisation, les Africains étaient en désaccord quant à la typologie de l’organisation à mettre en place pour coordonner et harmoniser leurs relations. En 1999, suite à la déclaration de Syrte, élaborée sous l’impulsion de Mouammar Kadhafi, l’OUA fut transformée en UA, dont la création a été officialisée à Durban (Afrique du Sud) en 2002.

En créant l’OUA, les Africains avaient l’ambition de relancer l’organisation panafricaine par le biais d’un consensus entre les dirigeants africains selon lequel, pour réaliser le potentiel de l’Afrique, il était nécessaire de recentrer la lutte sur la décolonisation et débarrasser le continent de l’apartheid. Puisque, dans le panafricanisme, les Africains cherchaient et continuent toujours à en dresser le bilan, nous pouvons affirmer sans détour qu’il est largement négatif pour les raisons suivantes :

Les relations entre les pays africains sont aujourd’hui comparables à un terrain conflictuel. Cela s’explique par le manque de coordination politique entre les États africains (absence d’harmonie). Nous précisons d’ailleurs que leur développement est lié à une véritable unité préalable, qui serait matérialisée par le concept de panafricanisme. En prenant exemple sur l’Union européenne, après la Seconde Guerre mondiale, Robert Schuman, homme politique français, avait décidé de créer l’Union européenne afin de booster et accroître la vie économique des États européens, ce qui a conduit au développement de la majorité de ces États. Pour matérialiser le panafricanisme, les Africains doivent cesser de répéter les mêmes erreurs et inventer un destin commun. Pourquoi ne pas déclarer, comme les femmes de Castiglione en 1859 lors de la bataille de Solférino après l’appel à l’aide d’Henry Dunant, le père du droit international humanitaire, au profit des militaires blessés laissés sans traitement, en disant "fratelli tutti", ce qui signifie "nous sommes tous des frères"? Si les Africains ne le font pas, le concept de panafricanisme souffrira d'un manque d'effectivité et demeurera une route longue. Aujourd’hui encore, le fait pour les Africains de partager un même continent n’est pas synonyme d’unité, car l’unité a ses déterminants, tels que l’harmonie.

Les origines de l’impasse quant à la réalisation du panafricanisme ne sont pas seulement endogènes, mais aussi exogènes. Par exemple, l’OTAN a participé activement à la chute du régime libyen et a décidé de mettre un terme à la vie de Mouammar Kadhafi (« Les dirigeants du monde entier ont salué la mort de Mouammar Kadhafi, jeudi, à Syrte »)[1], prétextant intervenir pour la sécurité de la population. Tout cela simplement parce que le Colonel souhaitait matérialiser le panafricanisme en créant une monnaie commune dans le cadre de l’Union africaine, une organisation créée grâce à son impulsion. C'est pourquoi il est considéré comme la cheville ouvrière de la déclaration de Syrte. Après sa mort, son corps a été laissé à la merci de la foule, avec des images extrêmement violentes, montrant combien les Occidentaux ne veulent jamais voir la matérialisation du panafricanisme. Ils préfèrent une Afrique où la violence est stable et l’unité instable. À ce titre, l’Afrique doit tout faire pour échapper au contrôle des Occidentaux. Nous ne manquerons pas de citer l’assassinat par les Occidentaux, ce qui atteste combien l’Occident n’a pas d’amis, seulement des intérêts.

En conclusion, avec la montée en puissance de certains Africains militants pour la matérialisation du panafricanisme, tel que Kemi Seba, qui a récemment brûlé son passeport français pour démontrer son appartenance au panafricanisme, ou Maud-Salomé Ekila, journaliste, réalisatrice et militante de l’ONG Urgences Panafricanistes, toutes ces actions sont respectables. Mais les Africains doivent d’abord prendre conscience de la nécessité d'installer le panafricanisme de manière effective, ce qui aboutira à notre détachement total de l’Occident et à l’installation de l’harmonie entre les États africains.

[1] LE JDD, Lybie : la mission de l’Otan prendra fin le 31 octobre, https://www.lejdd.fr/International/Libye-la-mission-de-l-Otan-prendra-fin-le-31-octobre-409871-3227939, consulté le 16/06/2024, Rédaction le 20/10/2011 à 13:26, Mis à jour le 25/01/2023 à 10:48

Armand Kuhalesa Emmanuel

Armand Kuhalesa Emmanuel est un juriste et fervent défenseur du panafricanisme, né à Kinshasa et de nationalité congolaise. Diplômé en droit de l’Université de Kinshasa, il se distingue par son style d’écriture poétique et son engagement profond pour l’unité et l’émancipation de l’Afrique.

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